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ADDOA : Aoujeft – préserver l’équilibre fragile des oasis de l’Adrar

ADDOA : Aoujeft – préserver l’équilibre fragile des oasis de l’Adrar

Au cœur de l’Adrar mauritanien, la commune d’Aoujeft abrite un patrimoine vivant unique : des palmeraies millénaires, des savoirs agricoles ancestraux, et des femmes et des hommes qui font vivre le désert. Mais cet écosystème, vital pour la région, montre aujourd’hui des signes de fragilité.
Pour mieux comprendre les menaces qui pèsent sur les oasis et identifier des solutions durables, une étude approfondie a été conduite en 2025 dans le cadre du projet ADDOA – Appui au Développement Durable des Oasis de l’Adrar, mis en œuvre par Tenmiya et le CARI, avec l’appui de l’Agence Française de Développement (AFD).

Un écosystème vital sous pression

Avec ses 170 000 palmiers dattiers et une production annuelle d’environ 2 800 tonnes, Aoujeft est l’un des cœurs économiques de l’Adrar. Le palmier structure la vie agricole, sociale et environnementale.
Mais selon le rapport de diagnostic, cette stabilité est menacée : rareté de l’eau, ensablement, salinisation des sols, maladies du palmier et désorganisation des filières fragilisent l’ensemble du système oasien.

Les producteurs s’adaptent, mais les contraintes s’accumulent : les puits s’assèchent, les jeunes partent, et les terres s’épuisent. Sans appui structuré, ces difficultés pourraient rapidement compromettre la durabilité du modèle oasien.

L’eau, enjeu vital et facteur d’inégalités

L’étude pointe la baisse alarmante du niveau des nappes phréatiques. Les exploitants se tournent vers les forages profonds alimentés par des pompes solaires, coûteuses à entretenir.
Ce modèle accentue les inégalités d’accès à l’eau entre zones de vallée et du plateau du Dhar. La gestion collective et la planification concertée des ressources hydriques apparaissent comme des priorités majeures pour la commune.

Des sols menacés par le vent et le sel

L’ensablement et la dégradation des sols sont identifiés comme des menaces structurelles. Les dunes avancent, les parcelles s’enfouissent, et la productivité diminue. À cela s’ajoute la salinisation liée à une irrigation non maîtrisée.

Le rapport recommande des mesures simples : reboisement avec des espèces locales, restauration des haies vives, paillage, compostage et travaux de fixation mécanique des dunes. Ces pratiques agroécologiques, déjà expérimentées dans certains villages, permettent de réduire les pertes en eau et de restaurer la fertilité.

Le palmier dattier, un géant vulnérable

Les maladies et ravageurs – notamment la pourriture du cœur et la maladie locale dite “Ghagha” – inquiètent les producteurs. Faute de moyens de diagnostic et de suivi, les réponses restent souvent empiriques.
L’étude préconise de renforcer la surveillance phytosanitaire, de former les exploitants et de développer la lutte biologique à partir de produits naturels (neem, ail, piment). La préservation du palmier est une condition essentielle de la résilience oasienne.

Femmes et jeunes, moteurs de la résilience locale

Les femmes d’Aoujeft sont au cœur de l’économie oasienne : transformation des dattes, maraîchage, artisanat. Pourtant, leur accès au crédit, à la formation et aux équipements reste limité.
Le rapport appelle à valoriser leur rôle économique à travers des fonds d’appui dédiés et la promotion de l’entrepreneuriat féminin. Les jeunes, quant à eux, peinent à trouver leur place dans un secteur agricole exigeant. Le projet ADDOA entend soutenir leur engagement à travers des initiatives d’emploi vert et des formations techniques adaptées.

Des pistes d’action concrètes

L’étude formule des recommandations opérationnelles :

  • Fixer les dunes et restaurer les ceintures végétales ;
  • Réhabiliter les puits et généraliser l’irrigation économe ;
  • Structurer les filières de dattes et de maraîchage ;
  • Renforcer la gouvernance locale à travers la planification concertée ;
  • Mettre en réseau les coopératives pour mutualiser les équipements et partager les savoirs.

Autant de leviers que le projet ADDOA mobilise déjà sur le terrain pour redonner souffle aux oasis.

Préserver un patrimoine vivant

L’étude d’Aoujeft rappelle que les oasis ne sont pas des vestiges du passé, mais des modèles d’équilibre entre l’homme et la nature.

Les défis sont nombreux, mais les solutions existent, à condition de miser sur la concertation, la transmission et l’innovation locale.

À travers ADDOA, Tenmiya et le CARI accompagnent cette transition vers un développement oasien durable, où les femmes, les jeunes et les producteurs deviennent les véritables gardiens d’un patrimoine écologique et culturel unique dans le Sahara mauritanien.

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