Au cœur du désert mauritanien, les oasis de l’Adrar demeurent des bastions de vie. Entre palmeraies, maraîchage et savoir-faire ancestral, elles constituent l’un des rares écosystèmes capables de concilier agriculture, culture et résilience. Mais cet équilibre fragile est aujourd’hui menacé : raréfaction de l’eau et de la main d’oeuvre, baisse des rendements, manque de structuration des filières… Face à ces défis, l’étude menée dans le cadre du projet ADDOA (Appui au Développement Durable des Oasis de l’Adrar, 2024 – 2027), financé par l’Agence Française de Développement (AFD) et mis en œuvre par TENMIYA et le CARI, apporte un éclairage inédit et propose des pistes concrètes d’action.
Une étude pour comprendre et agir
Réalisée à la fin de l’été 2025, dans les communes d’Atar et d’Aoujeft, l’étude commanditée par le projet ADDOA a permis de dresser un diagnostic complet du tissu agricole oasien : acteurs, exploitations, filières agricoles, organisations faitières. Près de 80 entretiens ont été conduits pour comprendre les réalités économiques, sociales et environnementales de ces territoires. Les résultats de cette étude serviront à mieux cibler les actions du projet ADDOA en cours.
Les résultats sont sans appel : la durabilité du système oasien est menacée par l’épuisement des ressources hydriques, la désorganisation des chaînes de valeur agricoles et la faible reconnaissance du rôle économique des femmes, pourtant essentielles dans la transformation et la commercialisation des dattes et légumes. Le rapport révèle également le poids de la pauvreté et du chômage dans une région où la population dépend majoritairement du palmier dattier et des cultures sous-palmiers pour sa subsistance.
Malgré ces contraintes, l’étude souligne un fort potentiel : une production phoenicicole de plus de 2.500 tonnes par an, une riche diversité de variétés locales, un dynamisme associatif et un ancrage culturel profond autour des oasis. Cartographie à l’appui, elle recommande pour un accompagnement structuré des acteurs, une meilleure gouvernance territoriale et une valorisation économique durable des produits oasiens.
ADDOA : transformer le diagnostic en action
Pour répondre aux enjeux identifiés par les Tenmiya et le CARI, et précisés par cette étude, le projet ADDOA entend redonner souffle et perspectives aux oasis du territoire. Il vise à renforcer durablement les dynamiques locales de sauvegarde et de valorisation du système oasien.
Concrètement, le projet soutient :
- la mise en place d’un fonds d’appui aux initiatives productives, permettant de financer des microentreprises et coopératives locales ;
- le renforcement de capacités des acteurs des filières agricoles locales ;
- l’élaboration de plans stratégiques pour les unions faitières ;
- et la cartographie interactive des acteurs et exploitations pour faciliter la planification communale.
ADDOA ne se limite pas à un appui économique : il ambitionne aussi d’institutionnaliser le développement durable des oasis dans les politiques locales, en intégrant les enjeux oasiens dans les Plans de Développement Communaux d’Atar et d’Aoujeft. Le projet s’inscrit ainsi dans la continuité du Programme d’Actions Concertées des Oasis (PACO) et du projet PICODEV, tout en complétant l’action du projet européen PROFOB dédié à l’entrepreneuriat féminin oasien.
Vers une économie oasienne résiliente et inclusive
Au-delà de l’appui matériel et technique, ADDOA cherche à impulser une véritable dynamique collective. Il promeut une approche participative, fondée sur la concertation multi-acteurs : collectivités locales, services techniques, coopératives, unions, institutions financières. Ensemble, ils œuvrent à la mise en place de mécanismes pérennes de gestion des ressources, de valorisation des produits et de création d’emplois pour les jeunes et les femmes.
L’enjeu est clair : faire des oasis de l’Adrar des pôles d’innovation rurale et de résilience climatique. En misant sur l’agroécologie, la gouvernance locale inclusive et la valorisation économique des savoirs traditionnels, ADDOA entend démontrer que les oasis ne sont pas des vestiges du passé, mais bien des laboratoires vivants d’un développement durable adapté aux zones arides.